Les juges de la CPI demandent aux procureurs de juger M. Ntaganda

Les procureurs de la Cour pénale internationale (CPI) ont réfuté les allégations « très éloignées de la vérité » selon lesquelles la milice de Bosco Ntaganda œuvrait pour la paix et était ouverte à tous les groupes ethniques. Ils ont affirmé qu’il existait assez d’éléments de preuve pour juger M. Ntaganda.

Lors des observations finales présentées lors de l’audience de confirmation des charges, l’avocat de l’accusation Nicole Samson a déclaré que la déposition de 18 témoins oculaires, 10 membres de l’Union des patriotes congolais (UPC), de six observateurs indépendants ainsi que des vidéos et des preuves documentaires montraient que le groupe commettait des crimes sur les civils qui n’étaient pas hema.

« Les remarques publiques des chefs militaires de l’UPC n’infirment pas la déposition de ces témoins », a déclaré Mme Samson.

Hier, l’avocat de la défense Marc Desalliers a présenté une vidéo dans laquelle les habitants de Mongbwalu, au Congo, semblaient accueillir chaleureusement l’accusé et ses troupes. Dans les images filmées en novembre 2002, M. Ntaganda et le président du groupe, Thomas Lubanga, indiquaient que leur objectif était de rétablir la paix dans la région.

Desalliers a déclaré que les images vidéos montraient que la branche militaire de l’UPC, les FPLC, combattait des milices rivales qui avaient pillé des maisons et des magasins et qui avaient forcé les habitants à fuir.

Selon Mme Samson, ces déclarations publiques ne reflétaient pas la réalité. Elle a indiqué que la vidéo était destinée à des fins de propagande. Elle « ciblait les puissances étrangères y compris celles qui étaient présentes en Ituri à cette époque ». Elle a déclaré que le journaliste qui avait filmé les images provenait de Radio Kandip qui était contrôlé par l’UPC à ce moment-là.

Mme Samson a indiqué que l’intégration de personnes qui n’étaient pas hema au niveau du commandement du groupe était « symbolique » pour donner une bonne image publique du groupe mais que ces personnes n’étaient pas impliquées dans la prise de décision.

Un des hauts responsables du groupe qui n’était pas d’origine hema a déclaré qu’il avait rejoint le groupe car il n’avait pas eu le choix. Il a précisé qu’il l’avait rejoint car il « ne voulait pas être tué ».

Les procureurs souhaitent que les juges poursuivent M. Ntaganda, un citoyen congolais, et le juge pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Il est accusé de 18 chefs, notamment de viol, d’esclavage sexuel, de pillage, de meurtre et d’utilisation d’enfants soldats. Il aurait commis les crimes en 2002 et 2003 lorsqu’il était sous-chef d’état-major de l’UPC/des FPLC.

Ce matin, l’avocat de la défense Caroline Buteau a demandé aux juges de rejeter les charges retenues à l’encontre de M. Ntaganda en arguant que l’accusation ne disposait pas d’éléments de preuve suffisants pour étayer ses allégations. Elle a déclaré qu’il était allégué que M. Ntaganda était coupable de transfert forcé de population et que la vidéo présentée devant la Cour montrait un déplacement de civils. « Ils ont été alerté des opérations militaires aussi ils se sont partis pour fuir les combats ».

L’accusation « ne démontre pas qu’il y a eu un ordre ou un message spécifique de la part de M. Ntaganda qui les a forcé à se déplacer » a-t-elle indiqué.

Mme Buteau a également intimé aux juges de rejeter les charges d’enrôlement, de conscription et d’utilisation d’enfants de moins de 15 ans car l’accusation n’avait pas démontré l’existence de ces enfants au sein du groupe.

Elle a précisé qu’il était difficile d’évaluer l’âge d’une personne en se basant sur l’apparence physique. Elle a soutenu que les experts avaient conclu que la croissance et l’apparence d’une personne pouvaient être affectées par des facteurs tels que le régime alimentaire. Elle a demandé aux juges de ne pas prendre de décision quant à l’âge des enfants qui servaient dans le groupe de M. Ntaganda en se basant sur les photographies et les vidéos fournies par l’accusation.

Elle a également souligné les nombreuses incohérences présumées présentes dans les dépositions des témoins de l’accusation qui affirment avoir servi dans l’UPC en tant qu’enfants soldats.