M. Ntaganda dépose une demande « de non-lieu » devant la CPI

Les avocats de Bosco Ntaganda projettent de déposer une demande de non-lieu dans laquelle ils solliciteraient auprès des juges de la Cour pénale internationale (CPI) l’acquittement de l’ancien commandant rebelle congolais sans qu’il n’y ait présentation des arguments de la défense.

Cette demande attendue a été tout d’abord indiquée dans une demande du 13 avril déposée par les avocats de la défense demandant aux juges de leur accorder un report de la date limite pour le dépôt de leur demande. Ce report était nécessaire car le système de gestion des dossiers de la Cour a été indisponible pendant plusieurs jours pour l’installation d’un nouveau logiciel. Cela a empêché les avocats de la défense d’avoir accès au dossier de l’affaire et aux éléments de preuve soumis dans cette affaire.

Ntaganda est jugé à La Haye depuis septembre 2015 et l’accusation a clôturé la présentation de ses moyens à charge et son dernier témoin a témoigné à la mi-février 2017. Les victimes participant au procès ont conclu la présentation de leurs témoignages plus tôt dans le mois, préparant la voie à une ouverture éventuelle de la présentation des moyens de la défense.

L’ancien commandant de l’Union des patriotes congolais (UPC) répond de 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité qui auraient été commis par lui-même et par ses soldats en 2002 et 2003 alors qu’il exerçait des fonctions de haut rang au sein de la milice. M. Ntaganda a nié les charges et ses avocats ont soutenu que l’accusation n’avait pas prouvé la culpabilité de l’accusé.

En application d’une décision délivrée en juin 2015 sur le déroulement des procédures dans ce procès, la défense a été invitée à déposer la demande de non-lieu dans les cinq jours suivant la conclusion des témoignages des victimes, par conséquent le 18 avril. La défense a demandé aux juges de déplacer cette date limite au 25 avril.

Stéphane Bourgon, l’avocat principal de la défense, a déclaré que bien que la défense ait déjà effectué quelques recherches et préparations pour déposer le non-lieu, la demande avait été faite en conformité avec les règles de la Chambre de première instance relatives au déroulement des procédures du procès Ntaganda, qui exige un accès à la totalité du dossier et aux documents admis en tant qu’éléments de preuve.

« C’est capital pour une demande de cette nature et de cette importance », a-t-il ajouté. « De plus, dans les derniers jours avant le dépôt de sa demande, la défense devra vérifier les autorités sur lesquelles elle s’appuie ».

En avril 2016, une demande de non-lieu avait entraîné la décision de mettre fin à l’affaire concernant le ministre et député kényan William Samoei Ruto et le journaliste de radio Joshua arap Sang. Dans la demande, l’accusé avait sollicité les juges afin qu’ils concluent à un non-lieu, qu’ils rejettent les accusations portées contre les deux accusés et qu’ils prononcent l’acquittement. Au moment où les juges clôturaient l’affaire, ils ont déclaré que leur décision n’excluait pas de nouvelles poursuites dans le futur que ce soit par la CPI ou par une juridiction nationale.

Outre les demandes anticipées de non-lieu, la défense de M. Ntaganda a sollicité auprès des juges une suspension du procès, soutenant que l’accusation avait abusé des procédures judiciaires en ayant accès de manière inappropriée à des informations cruciales de la défense. Dans une demande déposée le mois dernier, sur laquelle les juges n’ont pas encore statué, les avocats de la défense ont estimé que lorsque l’accusation enquêtait sur M. Ntaganda au sujet d’une présumée subornation de témoins, elle avait obtenu des centaines d’enregistrements de ses conversations, notamment celles sur la stratégie de la défense et sur sa connaissance personnelle sur l’affaire. De ce fait, selon les avocats de la défense, M. Ntaganda a subi un préjudice irréparable.

L’accusation a toutefois rejeté la tentative de la défense de suspendre le procès, affirmant que les avocats de M. Ntaganda avaient omis d’énoncer les faits qui équivaudraient à un abus de droit ou qui justifieraient « le recours exceptionnel » à une suspension du procès.

Entretemps, les avocats de M. Ntaganda ont demandé aux juges de reporter la date du début de la présentation des éléments par la défense, arguant qu’ils manquaient de ressources et de temps suffisants pour préparer leur dossier et débuter la présentation de leurs témoignages d’ici la fin du mois de mai, tel que les juges l’ont précédemment ordonné. Les juges ont rejeté la demande de report et ont ensuite refusé une tentative des avocats de faire appel de cette décision.

Le verdict des juges concernant le report de la date limite pour le dépôt de la demande de non-lieu n’a pas été rendu public.