La défense interroge un membre de l’UPC sur les atrocités commises par une milice rivale

Les avocats représentant l’accusé de crimes de guerre Bosco Ntaganda devant la Cour pénale internationale (CPI) ont conclu l’interrogatoire d’un ancien membre de la milice dans laquelle l’accusé était un haut commandant. Le contre-interrogatoire du témoin s’est concentré sur des extraits vidéo filmés dans la ville de Bunia, située dans l’est de la République démocratique du Congo, qui impliquent une milice rivale dans les meurtres et les pillages perpétrés.

Les extraits, qui ont été projetés au témoin aujourd’hui, datent du 13 mai 2013, et montrent des images de différents lieux des environs de Muzipela, une ville qui venait juste de tomber sous le contrôle des troupes de l’Union des patriotes congolais (UPC).

Dans la vidéo,un commentateur anonyme affirme que des combattants appartenant au groupe ethnique Lendu ont pillé des magasins du marché local et ont massacré des civils cinq jours avant que les troupes de l’UPC n’arrivent. M. Ntaganda est jugé pour des crimes commis par lui-même et par ses combattants de l’UPC qui appartenaient majoritairement à l’ethnie Hema et qui, selon les procureurs, visaient les communautés ethniques rivales, notamment les Lendu.

Dans une interview, un commandant de l’UPC identifié dans une vidéo comme étant Eric [Mbabazi] décrit la destruction visible autour de lui comme étant « regrettable ».« Lorsque nous avons pris la ville, des évènements comme ceux-ci ne se produisaient pas. Quand nous combattions les Forces de défense du peuple ougandais et que nous estimions que des personnes pouvaient mourir, nous nous retirions. Une autre force est entrée [dans la ville] et a provoqué un immense chaos », déclare le commandant Mbabazi dans la vidéo.

« La situation présentée dans la vidéo, vous l’avez vue de propres yeux, n’est-ce pas ? », a demandé l’avocat de la défense Stéphane Bourgon au membre de la milice qui témoignait sous le pseudonyme de témoin P030.

« Oui », a répondu le témoin, qui a confirmé qu’il connaissait le commentateur anonyme de la vidéo. Outre l’utilisation d’un pseudonyme, le témoin P030 a bénéficié d’une déformation numérique de la voix et du visage pendant la diffusion publique de son témoignage.

La vidéo montre également un séminaire avec un véhicule accidenté dans la cour ainsi que des papiers éparpillés autour du bâtiment principal. Une personne anonyme présente dans la vidéo attribue les dégâts aux combattants Lendu, affirmant qu’ils avaient « tout » volé, y compris les ordinateurs.

« Même les vêtements du prêtre ont été jetés au sol. C’est la maison du prêtre, l’endroit où les enfants étudiaient. C’est choquant et déchirant », déclare l’homme non identifié. Il indique une tombe anonyme en précisant qu’ils y ont enterré un inspecteur d’école primaire tué lors de l’attaque du séminaire.

Entretemps, la vidéo a également montré 13 cadavres jonchant le sol d’une maison qui aurait été touchée par un tir de roquette. Des habitants témoins de l’attaque déclarent à l’équipe de tournage qu’il s’agissait de quatre femmes, de cinq hommes et de quatre enfants. Un témoin oculaire indique qu’il n’y a pas de survivants de l’attaque dans cette maison et explique que les enfants massacrés sont « une petite fille et trois garçons ».

La majeure partie de l’interrogatoire du témoin P030 par la défense centrée sur les extraits vidéo a été mené à huis clos. Lorsqu’il s’est présenté pour la première fois à la barre vendredi, le témoin a évoqué la présence d’enfants soldats au sein de l’UPC, y compris dans l’escorte personnelle de M. Ntaganda. Nous ne savons pas quel poste occupait le témoin dans la milice mais il semble qu’il ait collaboré étroitement avec l’accusé, l’ancien chef du groupe, Thomas Lubanga.

Les audiences se poursuivront demain matin avec le témoignage d‘un nouveau témoin se présentant sous le pseudonyme de témoin P365.